Le domaine de prédilection, s’il en est un, où s’appréhende la problématique de l’interlégalité au pays et dans lequel les tribunaux ont fréquemment recours au droit international en droit interne est, certes, celui des libertés fondamentales. Besoin de s’en convaincre de nouveau? Pensons à l’arrêt Saskatchewan Federation of Labour, en 2015, lequel portait sur la liberté d’association garantie à l’article 2(d) de la Charte canadienne des droits et libertés. Dans le cadre de sa décision, reconnaissant pour la première fois un droit de grève protégé constitutionnellement, la Cour suprême du Canada s’est alimentée allègrement des normes internationales en la matière, ainsi que de l’expérience étrangère. Le présent texte s’intéresse à la participation du judiciaire dans la mise en œuvre des obligations internationales du Canada relatives aux droits humains; l’accent sera mis sur les obstacles et embûches à cet égard qu’on observe en jurisprudence.
En vertu de l’épistémologie internationale, ces questions sont présentées comme toutes simples puisque la prémisse postulée d’emblée est la suprématie de la normativité internationale. Le principe de base, allant au-delà des traités et de pacta sunt servanda codifié à l’article 27 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, veut en effet que toute obligation internationale doive être exécutée de bonne foi par les États. À cela s’ajoute le principe de la primauté du droit, tel qu’appliqué à la sphère internationale (« international rule of law »). Ce principe inclut minimalement les valeurs associées à la légalité, c’est-à-dire qu’à titre de principaux sujets de droit, les États doivent prendre au sérieux le droit international, y compris dans son exécution et dans sa mise en œuvre en droit interne, le cas échéant.